Télétravail : Le nouveau challenge des managers (CFDT)

Par Emmanuelle Pirat— Publié le 26/11/2021 à 11h16 sur le site de syndicalisme hebdo

S’il y a un domaine où le « monde d’après » se différencie du monde d’avant-crise, c’est bien celui du management. Encadrer des équipes présentes et d’autres à distance implique de nouvelles règles à définir collectivement.

« La pandémie a cassé les codes de la culture présentielle française. » Et, pour le sociologue Jean Viard – auteur de La révolution que l’on attendait est arrivée1–, « c’est un acquis indéniable ». Mais, pour les managers, le fait de ne plus avoir systématiquement leurs équipes sous la main a conduit à une remise en question profonde. Avec une partie de leurs troupes en télétravail et une partie sur site, comment faire ? Comment coordonner le travail sans risquer de perdre certains collaborateurs en route ?

1. Éditions de L’Aube, 240 pages.

« Il y a en effet de forts enjeux à maintenir l’équilibre et l’équité dans le collectif », reconnaît Mélanie Coupé, DRH du groupe de transports Breger, intervenant lors d’un webinaire2de l’Anact (Agence nationale pour l’amélioration des conditions de travail) en juin intitulé « Management en télétravail et sur site : comment faire équipe ».

2. https://semaineqvt.anact.fr/le-programme/management-en-teletravail-et-sur-site-comment-faire-equipe.

Pour répondre à ces impératifs, son entreprise a choisi le dialogue, la mise en discussion du travail. « Il était important de définir ensemble un nouveau cadre, une nouvelle façon de travailler, pour que tout le monde s’y retrouve. Et pour que la charge de travail reste équilibrée », donnant l’exemple de certaines tâches (comme l’accueil téléphonique) qui étaient désormais assurées par les personnes sur le site pour que celles en télétravail se concentrent sur d’autres priorités.

Une organisation bien spécifique

Autre défi pour les managers : la communication et le partage de l’information. Autant il est (plus) facile de réunir au pied levé son équipe pour un brief rapide dans son bureau ou passer une information à l’ensemble d’un plateau quand on est sur un modèle « présentiel », autant il est plus délicat d’organiser la communication quand on est sur un modèle hybride.

Ainsi, pour les réunions, si une partie des collaborateurs est dans la salle et l’autre en visio, « cela crée forcément un déséquilibre, car ceux qui sont à distance ont souvent plus de difficulté à participer. En tant que manager, cela va demander une attention très particulière, solliciter davantage les personnes à distance, peut-être. Car le manager ne peut plus s’appuyer sur les expressions et le langage du corps, qu’il peut percevoir en présentiel », note Jérôme Chemin, secrétaire national de la CFDT-Cadres, selon qui l’enjeu est de « bien comprendre que le télétravail, ce n’est pas une récompense. Ni un duplicata de ce qui se pratique au bureau. C’est une organisation du travail spécifique qui doit être pensée, pilotée et organisée par les managers ».

Cela suppose que ces derniers bousculent les habitudes et acceptent de voir leur rôle se transformer. Avec évidemment la fin du « command and control », le modèle dominant du management à la française fonctionnant sur l’obéissance, la discipline et la hiérarchie, et « une recomposition du management avec la montée en puissance d’un management de soutien, avec davantage de confiance réciproque entre salariés et managers, davantage de délégation et d’autonomie », comme l’explique Martin Richer dans Chroniques du travail éloigné 1.C’est à cette condition que les nouvelles formes hybrides de travail pourront se déployer.

1. 2020 : Chronique du travail éloigné – Demandes de changement ? CFDT-Cadres, Observatoire des Cadres et du management Metis Europe.

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