Recherche : certaines primes sont-elles des crédits détournés ?

stock-photo-48407112-drop-of-liquid-in-a-test-tubeLE MONDE SCIENCE ET TECHNO | 20.06.2016 à 18h15

Pour ses recherches sur les maladies infectieuses, deux bourses européennes ont été attribuées à l’unité du CNRS de Montpellier que dirige Samuel Alizon, qui a refusé la prime individuelle qui lui était accordée.
Depuis 2010, le Centre national de la recherche scientifique (CNRS) octroie une prime aux chercheurs ayant obtenu une des énormes bourses de l’European Research Council (ERC), une agence de moyens qui finance des projets de 1,5 à 2,5 millions d’euros. Cette prime, l’indemnité spécifique pour fonctions d’intérêt collectif (Isfic), s’élève à 50 000 euros sur cinq ans. Bénéficiaire de l’un de ces pactoles, j’ai pourtant demandé à ne pas toucher cette Isfic, demande à laquelle, après beaucoup de résistance (et d’incompréhension), le CNRS a fini, exceptionnellement, par accéder.

Mépris du travail collectif

Accepter cette prime – qui représente presque deux ans de mon salaire – me poserait en effet un problème éthique. Appelons un chat un chat, ce serait un détournement de fonds : 50 000 euros net versés à un chercheur, c’est 69 000 euros amputés à l’enveloppe remise par l’ERC à l’organisme de tutelle et qui contribue au bon déroulement du projet, en fournissant par exemple des locaux ou en employant du personnel administratif.

On me rétorquera que la prime Isfic compense la surcharge de travail suscitée par un projet ERC. Notre direction pense-t-elle vraiment que les 97 % de chercheurs du CNRS qui n’ont pas la chance d’être financés par l’ERC ont une charge de travail inférieure d’un tiers ? D’autre part, pourquoi ne pas prendre en compte la surcharge de travail des gestionnaires de laboratoire ? Dans mon unité, le CNRS affecte une gestionnaire pour quatorze chercheurs CNRS, chacun ayant ses propres projets de recherche. Malgré deux financements ERC obtenus en 2015 dans l’unité, aucun renfort n’est prévu pour gérer toutes les commandes, missions et recrutements additionnels. N’est-il pas plus pertinent d’embaucher du personnel pour effectuer les tâches administratives supplémentaires que de verser une prime individuelle ?

la suite sur le site du Monde.

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